Logiciels de cave à vin : lesquels incluent la facturation et la gestion commerciale ?

05/10/2025

Pourquoi lier gestion de cave et gestion commerciale ?

Longtemps, la gestion de cave à vin s’est cantonnée à l’inventaire : fiches bouteille, gestion des entrées/sorties, alertes sur les millésimes à boire… Mais pour beaucoup de professionnels (cavistes, domaines, restaurants) et même quelques particuliers chevronnés, la vraie question est : comment aller plus loin ?

Concrètement : un outil de cave isolé est vite limité. Dès qu’il faut vendre, éditer des factures, tenir une comptabilité des mouvements financiers ou répondre à des clients, le besoin d’un logiciel mixte, mêlant gestion de cave et outils de facturation, s’impose. Cette hybridation progresse depuis plusieurs années en France. L’objectif : centraliser l’information pour limiter les ressaisies et maîtriser la traçabilité.

Ce marché reste toutefois spécialisé : la plupart des logiciels grand public se contentent de l’inventaire pur (exemple : CellarTracker, Vivino). A l’inverse, les outils que nous allons présenter sont conçus pour répondre aux exigences commerciales, et intègrent des briques de facturation adaptées au secteur du vin (gestion de clients, relances, éditions de devis, suivi des paiements, gestion fiscale spécifique…).

Quels profils ont besoin de ces modules ?

  • Cavistes indépendants : gestion commerciale classique, mais besoins spécifiques liés à la traçabilité et à la valorisation de stocks.
  • Domaines viticoles : gestion des allocations, suivi des clients particuliers/professionnels, édition de documents officiels (factures, BL, DEB).
  • Restaurants, clubs, associations : capacité à facturer des consommations, gérer des adhésions ou des locations de cave.
  • Amateurs “grande échelle” : certains particuliers très équipés souhaitent archiver des cessions/achats, calculer une “plus-value”, générer rapports et étiquettes pour la revente ou l’échange.

Notons qu’en 2024, environ 20% des domaines viticoles en France sont équipés d’un ERP gérant la facturation et la cave (source : Vitisphere). Pour les cavistes, ce taux grimpe à près de 50% selon une étude menée par La Revue du Vin de France. Preuve que le besoin est réel, mais le marché reste fragmenté : aucun mastodonte, mais une flopée de solutions spécialisées.

Fonctionnalités clés à attendre d’un logiciel “cave + facturation”

  • Gestion détaillée du stock (emplacement, millésime, conditionnement, fiche produit enrichie : cépage, région, etc.)
  • Édition de devis et de factures, personnalisation des documents, suivi des règlements (multi-modes de paiement, échéances…)
  • Base clients/fournisseurs, historique des transactions
  • Gestion fiscale adaptée aux spécificités vinicoles (TVA sur marge, droits accises, DEB/EMCS…)
  • Traçabilité et obligations légales (numéros de lot, gestion des retraits/rappels…)
  • Exports comptables, statistiques, inventaires valorisés
  • Connexion possible à un site marchand ou une caisse

Rares sont les outils gratuits à proposer ce niveau d’intégration. Il faut souvent viser des solutions payantes, hébergées en ligne (SaaS) ou installées sur site.

Comparatif des principaux logiciels de cave à vin avec facturation intégrée

1. vinipad / Caveasy Pro : l’écosystème dédié aux pros

  • Public : Cavistes, restaurants, domaines, caves collectives
  • Fonctionnalités : inventaire, gestion des clients, édition complète de devis/factures/avoirs/BL, gestion du multi-tarif, suivi des règlements, synchronisation avec balances.
  • Plus : une interface tablette très adaptée à la vente comptoir, tableaux de bord visuels, gestion du multi-utilisateur et connecteurs vers caisse, site web, etc.
  • À savoir : Caveasy Pro (société Caves Conseil) équipe 1900 caves en France (source : Caveasy.com), Vinipad est répandu chez les cavistes qui veulent moderniser leur image (plus de 500 restaurants équipés en 2023).
  • Limites : peu orientés production (plutôt négoce/vente), coût récurrent.

2. Elyx / Bacchus : la gestion commerciale “made in wine”

  • Public : Producteurs, domaines viticoles, négociants
  • Spécialités : gestion poussée du stock du chai à la vente, génération réglementaire (DAE, EMCS), facturation multi-devises, GRM (Gestion Relation Clients), édition automatisée des documents douaniers.
  • Plus : traçabilité accrue, gestion des allocations, export SaisieDéclarations (DGDDI…).
  • À savoir : Elyx équipe plus de 700 domaines dans le Bordelais, Bacchus est fort sur l’interface personnalisée et la compatibilité Mac/PC (source : bacchus.fr).
  • Limites : coût élevé, complexité initiale.

3. Vin e-Logik : l’ERP 100% vinicole

  • Public : domaines de taille intermédiaire à grands, caves coopératives
  • Fonctionnalités : gestion de cave, logistique, facturation, gestion des expéditions, paramétrage complet des tarifs et étiquettes fiscales, rapports de gestion, exports comptables.
  • Plus : approche modulaire, connexion interfaces tierces (site e-commerce PrestaShop/Magento…), conformité CNIL et RGPD poussée.
  • À savoir : équipe plus de 2 000 utilisateurs, présence à l’international (source : vinelogik.com).
  • Limites : surdimensionné pour les amateurs ou petits commerces, architecture parfois complexe à prendre en main.

4. VinoBusiness / La Solution Cave à Vin Go&Vino

  • Public : petites structures, particuliers avancés
  • Fonctionnalités : inventaire, création de factures, gestion des cessions/achats revente, édition de rapports, génération d’étiquettes personnalisées.
  • Plus : solution française, ergonomique, bonne pour la gestion multi-cave (y compris personnels et associatifs).
  • À savoir : VinoBusiness propose une vraie balance stock/valeur (utile pour “sortir” la valeur réelle de cave), Go&Vino est plus minimaliste. Voir : vinobusiness.fr
  • Limites : manque de modules avancés (EMCS, gestion des accises…), support parfois artisanal.

5. ERP généralistes adaptés au vin : OpenConcerto, Cegid, Sage

  • Public : structures plus importantes, qui ont besoin d’un ERP “tout-en-un”
  • Exemples : OpenConcerto (libre et gratuit en partie, présence d’une gestion de stock par lots, facturation, e-commerce), Cegid Wine, Sage Gestion Commerciale avec modules œnologiques spécifiques (voir cegid.com).
  • Plus : intégration avec le circuit comptable du cabinet, reporting réglementaire automatisé, support solide.
  • À savoir : Cegid équipe plus de 40% des domaines équipés d’ERP “industriel” en France; OpenConcerto est apprécié de certains petits exportateurs pour sa flexibilité (source : openconcerto.org).
  • Limites : coût, besoin d’adaptation, support parfois moins “spécialiste du vin”.

Quid des logiciels purement amateurs ?

Parmi les grands noms de la gestion de cave pour particuliers (Vivino, CellarTracker, CavusVinifera, Vinoteka, Caveasy), très peu proposent une brique “ventes/facturation”. Le plus souvent, il s’agit d’export CSV de mouvement de cave, utile pour compiler manuellement un historique ou chiffrer la valeur de la cave, mais aucune facturation légale intégrée.

Exception notable : certains plugins ou modules ajoutés à CellarTracker (via des API tierces) proposent de générer des rapports “vente”, mais sans la rigueur d’un outil professionnel (TVA, mentions légales obligatoires, gestion des paiements).

François, amateur émérite basé à Reims, témoigne dans Le Figaro Vin : “Pour gérer mes échanges avec d'autres collectionneurs, j’utilise Excel, car ni Vivino ni CavusVinifera ne me donnent l’option d’éditer une facture légale ou de tenir à jour une vraie comptabilité de cave.” Témoignage fréquent chez les collectionneurs exigeants.

Facturation et obligations légales : des spécificités “vin”

La gestion de facturation dans le milieu viticole ne se limite pas à imprimer un bon avec prix et TVA. Voici quelques exemples concrets :

  • Numérotation des lots et traçabilité : La législation impose d’identifier chaque lot de bouteilles (lot, cuvée, conditionnement), et d’assurer la traçabilité en cas de contrôle ou de rappel. Les outils pros intègrent souvent cette couche obligatoire.
  • Droits d’accise et TVA sur marge : La fiscalité des ventes de vins (notamment à l’export) est complexe : déclaration d’accises, DEB (déclaration d’échange de biens), gestion différenciée des taux de TVA (sur marge, sur totalité). Exemples sur douane.gouv.fr.
  • Mentions légales spécifiques : Les factures de vin doivent comporter, en plus des mentions classiques, certains détails réglementaires liés à l’origine, l’appellation, la catégorie, voire le numéro de DAE/EMCS pour l’Union européenne.
  • Gestion des retours et des retraits produits : Les solutions pro proposent de relier chaque opération à un client et à un lot, avec édition de documents en cas de rappel sanitaire.

Pour le particulier qui revend occasionnellement quelques flacons, ces obligations ne s’appliquent pas. Mais dès qu’on franchit le cap d’une activité commerciale, une vraie solution s’impose.

Quand et comment choisir “un vrai” logiciel de cave à vin avec facturation ?

Au vu de l’offre, comment trancher ? Quelques axes pour dégrossir :

  • Pour un caviste indépendant : l’interface “point de vente” claire, la gestion des remises et des comptes clients, le suivi des ventes par vendeur sont capitaux. Vinipad ou Caveasy Pro font référence.
  • Pour un producteur : privilégier les outils capables de gérer la production, le stock en évolution (millésimes, cuves), et l’exportation réglementée. Bacchus, Elyx, Vin e-Logik, ou un ERP type Cegid sont à privilégier.
  • Pour un particulier “trader” : une “mini-facturation” suffit. VinoBusiness répondra au besoin, mais attention, aucune solution non professionnelle ne délivre de factures 100% légales d’un point de vue fiscal.
  • Coût attendu : générallement, prévoyez entre 25 €/mois (entrée de gamme, une cave, une caisse) et 150 €/mois pour une solution complète avec multi-utilisateurs, connecteurs, reporting et support.

Panorama : les tendances du marché et pistes d’évolution

  • L’intégration est le mot d’ordre : Les solutions de demain tendent à relier cave, site marchand, caisse et gestion fiscale sur une seule interface, limitant les désagréments de la “double saisie”.
  • Le mobile conquiert la cave : De plus en plus de modules sont utilisables sur tablette ou smartphone, permettant au caviste d’effectuer ses ventes depuis la salle ou le chai, d’inventorier à la volée.
  • L’IA commence à poindre : certains outils (ex : Bacchus dans sa version 2023) proposent une analyse prédictive des stocks et des ventes, ou la suggestion tarifaire selon les données du marché.
  • Les réglementations évoluent : avec la généralisation de la facture électronique (2026 pour la France selon economie.gouv.fr), il est capital d’anticiper la migration vers des logiciels compatibles. Une nouvelle contrainte… ou une opportunité pour simplifier la gestion.

On l’aura compris, même si la gestion de cave à vin reste une affaire de passion, dès que les volumes ou la dimension commerciale s’invitent dans l’équation, le choix d’un logiciel “cave + facturation” devient stratégique. L’offre s’affine, les solutions se spécialisent, tandis que les attentes des professionnels – mais aussi d’amateurs très aguerris – montent d’un cran. De quoi envisager la gestion de cave comme un exercice aussi pointu que la dégustation d’un grand cru.

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